Ce que j'ai pensé de

Ce que j'ai pensé de
Des bouquins, et pas de place pour les ranger

vendredi 4 juillet 2014

Graphotopophotologies, ou l'écriture du paysage. Jean-Luc Parent et Jacqueline Salmon.

Graphotopologies est le catalogue de l'exposition commune de Jacqueline Salmon et Jean Luc Parant, qui se tient en ce moment et jusqu'au 14 septembre 2014 à l'Ar(t)senal de Dreux. Il a été réalisé par Kristell Loquet et est publié par les éditions Marcel Le Poney. 

J'ai appris à lire le titre de l'exposition après en avoir lu le sous-titre : les écritures du paysages.

La photo est pourrie, mais le catalogue est très beau
Il faut donc découper ainsi :


Grapho : l'écriture
Topo : le lieu
Photo : la lumière
Logie : l'étude, le langage.

Le travail de Jean Luc Parant repose sur la confection d'installations à base de boules et de textes sur les yeux. J'ai toujours été imperméable aux idées dans l'art, aux concepts. Je suis quelqu'un de trop primitif pour accepter des explications dans le domaine du ressenti. Soit ça me parle, soit ça ne me parle pas, mais je n'aime pas qu'on m'en parle.

Pourtant, avec le temps, le travail de plasticien de Jean-Luc Parant m'apparaît bien trop riche et varié pour envisager son obsession pour les boules comme un concept. Elles son instrument. Un guitariste ne joue que de la guitare, mais il joue toutes sortes de musiques, toujours de la musique. Jean-Luc parant ne fait que des boules, mais il fait toutes sortes d'installations et c'est toujours de l'art. 

La boule me donne l'impression des œillères qu'on met aux chevaux. Parce qu'elle leurs permettent d'ignorer ce qui se passe sur les bords de la route, parce qu'elles leurs permettent de se concentrer sur le chemin, elles leur permettent d'avancer vite, loin. Paradoxalement, c'est peut-être ce point d'ancrage des boules qui a permis à Jen-Luc Parant d'aborder tous ces sujets, toutes ces compositions. C'est cette restriction qui permet le mouvement.

Alors que Kristell Loquet, l'éditrice de ce catalogue, souligne ce mouvement, on est frappé par l'immobilité des photographies de Jacqueline Salmon. Des paysages minéraux, des strates géologiques, des ciels, de l'eau. L'immobilité perçue n'est pas due à l'œuvre, mais à celui qui la regarde. Il est étonnant que cette femme qui est venue à la photographie par la danse dirige notre attention vers des lenteurs qui ne nous sont pas perceptibles. Les roches striées sont la trace de lentes sédimentations, de remaniements telluriques pour lesquels le millénaire n'est qu'une fraction de seconde. Ces enchevêtrements de branches de hêtres tortillards, qui en à peine quelques dizaines d'années dessinent des labyrinthes sont alors l'expression de la vitesse, des craquements qui font du ciel qu'on regarde par en-dessous un vitrail ou se déplacent lentement les nuages. 

Le dialogue entre les deux artistes résulte de l'enchevêtrement de leurs œuvres, qu'on devine dans le très beau catalogue réalisé par Kristell Loquet, mais qu'il faut aller apprécier à l'Art(s)enal de Dreux. Les gris, les ocres se répondent et les ciels de Jacqueline Salmon illuminent l'argile lacustre des boules de terres qui figurent les habitants du Lac de Grand-Lieu.

Les deux artistes se retrouvent lorsqu'ils se dépouillent de leurs étendards respectifs : les boules et la photographie. Les dessins, plus artisanaux, plus spontanés, parfois moins assurés, ont l'inattendu d'une conversation, la liberté aléatoire de l'échange, et montrent que l'exposition est bien plus qu'une simple juxtaposition des œuvres des deux auteurs.

On aurait aimé, enfin, j'aurais aimé, pouvoir en dire autant des textes de Jean-Luc Parant. Depuis toujours, ses textes sur les yeux, que certains trouvent hypnotiques, me semblent simplement simplement soporifiques. Pour quelques fulgurances on doit parcourir des pages entières de répétitions, de ratiocinations, comme une spirale plus agaçante qu'étourdissante.


Mais il me semble que ces textes sont à voir comme les boules, comme des briques de base à l'habillage graphique de certaines des œuvres exposées. Plutôt que de les lire dans ce catalogue très soigné par les éditions Marcel le Poney, il vaut mieux aller les regarder les yeux dans les boules, à l'Ar(t)senal de Dreux jusqu'au 14 septembre.  

Graphotopophotologies, 
Ar(t)senal, 5 Place du Marché Couvert 
28100 Dreux. 
tel : 02 37 50 18 61

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