Ce que j'ai pensé de

Ce que j'ai pensé de
Des bouquins, et pas de place pour les ranger

lundi 7 juillet 2014

Il était une rivière, de Bonnie Jo Campbell

Il était une rivière, de Bonnie Jo Campbell, paru au livre de Poche, commence un peu comme un marécage. Beaucoup de personnages, un peu de confusion, un peu de déjà-vu. Comme on peut reprocher à la littérature française son nombrilisme lassant, et je sais de quoi je parle, l'amour qu'a la littérature américaine pour les paysages sauvages, la forêt, les grands espaces tourne parfois à la recette folklorique.  

Margo Crane, quinze ans, mutique, évolue dans un épisode de Tom Sawyer, mais un épisode où tous les mâles à peine adultes chercheraient à la violer. Et puis la rivière trouve son cours, et le livre devient une sorte de road-movie aquatique. Margo s'échappe de sa famille de rednecks péquenauds un peu dégénérés, elle s'enfuit, avec une barque, un sac, un fusil, C'est que depuis toute petite, Margo tire mieux que tous les hommes du coin. Elle abat des cerfs, des rats musqués, des biches, et elle s'attache à son arme comme à un animal de compagnie. 

Au fil de son périple, on réalise que le principal ennemi d'une adolescente solitaire, ce n'est pas le froid, pas la faim, c'est le désir humain, sa brutalité. Une des grandes force de Bonnie Jo Campbell est d'éviter le manichéisme, de braver le politiquement correct. La frontière entre protection et domination est floue, et l'auteure ne cède jamais au jugement et à la condamnation, mais elle dit seulement une parole et nous voilà instruits. L'ambiguïté de Margo face à son propre désir, à son propre corps résulte d'une alchimie complexe entre son histoire et sa personnalité. Margo préfère les gestes aux mots, et c'est un des tours de force du livre que de nous faire ressentir autant d'attachement pour une jeune fille silencieuse, obstinée, solitaire malgré elle. 

Bien-sûr, on aurait aimé, enfin, j'aurais aimé, que certaines scènes traînent moins en longueur, que certaines péripéties, un peu répétitives, disparaissent ou apportent un changement plus décisif dans l'évolution du personnage. Et puis, au détour d'un barrage, lorsque Margo doit quitter la rivière pour quelques pages, on regrette ce flottement, cette dérive à laquelle on réalise soudain qu'on avait pris goût. On passe d'une rivière à l'autre, la jeune fille s'arrête, une jeune femme s'élance. La troisième partie est sans doute la meilleure. 

Il était une rivière, de Bonnie Jo Campbell, paru au livre de Poche, coule enfin avec une force placide, ample, comme vers un estuaire plein de promesses.  

Il était une rivière, de Bonnie Jo Campbell, paru au livre de Poche,7,60 €

L'audio est là, mais je n'en suis pas très fier. 
Le fond sonore vient d'un truc trouvé sur Soundcloud ici. 

TL ; DR : Il était une rivière, de Bonnie Jo Campbell, au Livre de Poche. L'histoire de Margo, qui fuit sa famille de péquenauds, avec un sac, une barque, un fusil. Sans grand originalité, un road-movie aquatique où la nature prend la place que seule la littérature américaine sait lui donner. 

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